Né le 11 mars 1916 à Nantes (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique), fusillé le 29 janvier 1943 au terrain de tir du Bêle à Nantes ; chaudronnier ; militant communiste ; résistant, membre des FTPF ; Procès des 42.

Raymond Hervé (debout au milieu) avec ses amis de la Jeunesse communiste, en 1936
Raymond Hervé (debout au milieu) avec ses amis de la Jeunesse communiste, en 1936
Pierre Le Floch, debout à gauche, Guy Gautier, accroupi à gauche, Léon Gouermer, accroupi à droite.
IMG/png/Herve_Raymond.png Tombe au cimetière militaire de la Chauvinière à Nantes
Tombe au cimetière militaire de la Chauvinière à Nantes
Fils d’Édouard, Joseph Hervé, manœuvre, "grand invalide du travail", et d’Yvonne, Marie Cadin, ouvrière aux Tabacs (cigarière), tous deux communistes actifs dans l’aide aux républicains espagnols. Ils habitaient 2 rue du Dahomey à à Nantes.
Raymond Hervé était ouvrier chaudronnier et travailla à la Compagnie européenne du gaz de Nantes de mai 1932 à juin 1941 où il créa la section CGT avec son frère Édouard.
Militant actif du cercle de Doulon des Jeunesses communistes avant la guerre, il fit longtemps partie d’un cercle artistique où il fit la connaissance de nombreux militants. Comme d’autres jeunes militants, il n’était pas toujours facilement « contrôlable », ce qu’atteste un PV de police de mars 1931 qui lui reproche le jet de pétards dans un office religieux avec son camarade Aoustin.
Raymond Hervé était, en 1936, militant des Jeunesses communistes du Sud-Loire (Chantenay) à Nantes. Le groupe, dirigé par Marguerite Joubert (Marguerite Lermite), comprenait Pierre Le Floch (mort en déportation), Guy Gautier (déporté à Dachau) et Léon Gouermer (déporté à Buchenwald). Mobilisé en septembre 1939, il revint à Nantes après l’armistice et participa très tôt aux activités du Parti communiste français (PCF) clandestin. Ainsi, est-ce lui qui convoya Fernand Grenier, évadé du camp d’internement de Châteaubriant, en juin 1941 . Il travailla alors aux Batignolles où il fit une propagande communiste active dans tous les ateliers jusqu’au 12 mars 1942, date qui vit la police perquisitionner son domicile et tenter – en vain — de l’arrêter à son travail malgré diverses planques et recherches, en particulier chez son frère qui habitait Saint-Sébastien. Le peu de matériel recueilli chez Raymond Hervé permit néanmoins à la police de le considérer comme l’un des dirigeants de l’Organisation spéciale (OS) de Nantes avec Jean Losq – ce qu’ils n’étaient pas. Raymond Hervé entra alors dans l’illégalité et poursuivit les attentats à la bombe contre les Allemands et les collaborateurs (hôtel de la Duchesse Anne, pont roulant des Batignolles, locaux du PPF), attaques de collaborateurs et vols de tickets de rationnement dans les mairies (Saint-Sébastien-sur-Loire et Monnières). Il échappa à une rafle à Concarneau.
Arrêté par le Service de police anticommuniste (SPAC) au mois d’août 1942 dans un jardin ouvrier de la route Vannes (ce qui fait dire à sa sœur Yvette "Il a été donné"), il fut conduit à la prison Lafayette de Nantes, torturé, puis présenté au juge d’instruction nantais Lebras le 9 septembre 1942. Ses camarades de combat, Louis Le Paih, Eugène Le Bris et Jean Marc, firent alors irruption chez le juge Lebras, que Raymond Hervé tua dans sa fuite.( cependant Renée Losq qui le cacha témoigna après guerre que R. Hervé n’était pas armé). Le maire de Nantes, Gaëtan Rondeau, fit appel à la population : « Le devoir impose à tous l’obligation impérieuse d’aider la police à mettre la main sur les auteurs de l’attentat du 9 septembre et leurs complices. »
La police arrêta ses parents et sa soeur Yvette qui fut conduite à la Kommandatur. Il furent gardés un mois à Nantes puis envoyés à Romainville d’où ils furent libérés deux mois après.
Un tract des Francs-tireurs et partisans (FTP), trouvé le 29 novembre 1942 et intitulé « La vérité sur les francs-tireurs », tente de répondre aux articles de la presse collaborationniste de l’époque qui présentent Raymond Hervé et ses camarades comme de vulgaires assassins : « Les Francs-tireurs savent qu’au lendemain de la délivrance de leur jeune héros, Raymond Hervé, sorti des griffes du juge d’instruction Lebras par un de leurs groupes de combat [...] des Français [...] informés par les torchons allemands ont crié au crime [...] Que savez-vous de notre Raymond Hervé ? Dans les journaux, vous avez vu une photo dont les traits ont été déformés à dessein. La tête qu’il fallait pour la circonstance ; Raymond Hervé, ce n’est pas cela. C’est un jeune métallurgiste, ancien employé du gaz [...] métallurgiste aux Batignolles, ensuite, il a à son honneur de nombreux faits d’armes contre l’ennemi. » Raymond Hervé, réfugié à Trégunc (Finistère) avec Eugène Lebris et Renée Losq, continua le combat avec les FTP de Bretagne sud (cambriolage de la mairie de Beuzec-Conq dans le Finistère le 24 septembre 1942) mais fut à nouveau arrêté le 26 septembre 1942 alors qu’il menait une attaque contre la poste de Lanester (Morbihan). Condamné à mort par le tribunal allemand de Nantes le 28 janvier 1943 (« Procès des 42 »), il a été fusillé au terrain de tir du Bêle le 29 janvier 1943.
Il fut enterré à Sautron à l’insu de la famille. À la Libération, sa soeur Yvette alla reconnaître le corps parmi une quarantaine d’autres.
Les derniers mots de la lettre qu’il écrivit à sa famille le 29 janvier sont : « Vive la France et vive le Parti communiste. »
Après-guerre, à Doulon, le PCF organisa une course cyclo-pédestre portant le nom de « grand prix Raymond-Hervé ».
Une cellule communiste nantaise porte son nom.
« Dernière lettre de Raymond Hervé
Nantes le 29 janvier 1943.
Chers parents,
Quand vous recevrez ma lettre, je ne ferai plus partie des humains car mon exécution a lieu dans quelques heures ainsi que six des mes camarades. Aussi je vous écris ces quelques mots pour vous dire Adieu à vous deux, ainsi qu’à Yvette, Adélaïde et mon cher petit neveu et à Édouard si vous avez le bonheur de la revoir ainsi qu’à tous les amis et camarades à qui vous direz que je meurs en Français, pour mon pays et pour mon Parti.
Et j’espère que mon parti saura faire réhabiliter notre nom que la presse a tant sali. Mais ma dernière pensée jusqu’à ma mort sera pour vous tous que j’aime et que j’ai toujours aimés. Toi, ma chère maman que j’aurais voulu tant revoir avant de mourir car malgré que je t’ai fait quelques fois de la peine je t’aime de tout mon cœur ainsi que toi mon cher vieux petit papa que j’ai fait rouspéter bien des fois je pense que vous arriverez à oublier et vous aurez quand même une heureuse vieillesse.
Toi ma chère petite Yvette, j’espère que tu te marieras et que tu seras heureuse en ménage et que tu conserveras un bon petit souvenir de ton frère Raymond qui t’a aimée jusqu’à sa mort et si tu as des enfants tu leur parleras de moi de temps en temps.
Toi chère Adélaïde que je tutoie dans mes derniers moments, je pense que tu seras heureuse mère et si tu as le bonheur de revoir mon frère Édouard tu l’embrasseras bien de ma part ainsi que mon petit gars qui j’espère sera élevé pour venger son oncle.
Je vous quitte tous en vous serrant encore une fois sur mon cœur. Votre fils qui vous aime et pensera à vous jusqu’au dernier moment.
Moille bons baisers à tous. Vive la France et vive le Parti communiste.
Raymond.
Texte reproduit par Presse océan, "Il y 50 ans la Libération". Le journaliste a recueilli le témoignage de sa soeur, Yvette Averty : " Un ou deux ans après le maire de Nantes est venu chez nous pour nous remettre la dernière lettre de Raymond. Elle avait été retouvée en Allemagne. On [les Allemands] ne nous l’avait pas transmise à l’époque car il criait vengeance." »
Sources

SOURCES : AVCC, Caen (Notes Thomas Pouty). – Arch. Dép. Loire-Atlantique 270W485, 270W487, 1694W48, 305 J 3. – Arch. Dép. Maine-et-Loire, 18W70. – Arch. J.-P. Molinari. – Le Phare, 11 septembre 1942, janvier 1943. – La Résistance de l’Ouest, 27-28 janvier 1945. – Clarté (1945-1949). – Les documents de Presse-Océan, La Résistance de l’Ouest, 1995. – Guy Haudebourg, Le PCF en Loire-Inférieure à la Libération (1944-1947), mémoire de maîtrise d’histoire, Université de Nantes, 1987. – Jean Bourgeon (sous la dir.), Journal d’un honnête homme pendant l’Occupation, Thonon-les-Bains, L’Albaron, 1990. – Christian Bougeard, Histoire de la Résistance en Bretagne. – Michel Prodeau, Itinéraires clandestins, Nantes, Opéra, 1995. – Dominique Bloyet, Nantes ; témoignage de Henri Gomichon (archives PCF de Loire-Atlantique). – Jean-Pierre Sauvage, Xavier Trochu, Mémorial des victimes de la persécution allemande en Loire-Inférieure 1940-1945, 2001. – Renseignements communiqués par Renaud Avez.— Site Résistance 1944 .

Guy Haudebourg, Jean-Pierre Besse, Claude Pennetier

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