Née le 3 mai 1903 à Nayemont-les-Fosses (Vosges) , guillotinée le 20 janvier 1944 à Dortmund (Allemagne) ; militante communiste ; résistante ; déportée NN.

Mariage de Suzanne et Antoine Berthier.
Archives Jeanine Berhier
Herry Suzanne, fille de Jean Baptiste et de Marie-Louise Parmentier, naquit le 3 mai 1903 à Nayemont-les-Fosses dans les Vosges. Elle épousa le 2 juin 1923, dans son village natal, Antoine Berthier Ce dernier était sous le Front populaire adhérent au syndicat CGT des cheminots. Il ne semble pas avoir été membre du parti communiste mais sûrement un sympathisant actif. Le couple, qui résidait n° 3 rue de la Renaissance à Jarny, avait cinq enfants en 1936, Madeleine née en 1925, Henri né en 1926, Laurence née en 1928, Antoine né à Jarny en 1932 et Lucien né en 1936. Antoine accepta début 1941 de devenir le dépositaire de tracts édités clandestinement par le Parti communiste, qui étaient ensuite distribués dans le bassin de Briey par des groupes de trois distributeurs.
La vie de Suzanne et Antoine bascula dans la nuit du 30 avril au 1er mai 1942 avec l’arrestation d’un couple ami Raymond et Maria Anciaux en flagrant délit de distribution de tracts à la volée à Abbéville et Fléville, tracts qu’ils avaient retirés peu avant chez les époux Berthier. « La brigade de gendarmerie de Jarny fut alertée et peu après, une quantité importante de tracts fut saisie au domicile de Berthier ». Furent mis sous scellés 18 tracts intitulés « Femmes de travailleurs lorrains, en avant », 45 tracts intitulés « Travailleurs de toutes les corporations Grève générale le 1er mai 1942 », 38 tracts intitulés « Vive le 1er mai », 56 tracts intitulés « 1er mai de lutte pour la libération de la France », 46 tracts en langue allemande, 422 « Humanité du 1er mai 1942 », 33 brochures intitulées « Gabriel Péri vous parle », 28 brochures intitulées « Non, le nazisme n’est pas le socialisme ».
Antoine fut arrêté et écroué à la gendarmerie de Jarny le 1er mai. Immédiatement, l’inspecteur des R.G. de Briey procéda à son interrogatoire puis son supérieur hiérarchique mena un second interrogatoire. Antoine blanchit sa femme Suzanne, tout « cela ne la regardait pas ».
Le 5 mai, le sous-préfet de Briey informa le préfet régional que « Mme Suzanne Berthuier vient d’être arrêtée par les autorités allemandes ». Elle avait été interrogée par l’inspecteur des R.G. lors de la perquisition du 1er mai. Elle déclarait alors ne s’être « jamais aperçue que (son) mari recevait des paquets tous les mois, pas plus que (elle ne savait) qu’il recevait des lettres de Paris (et) ne connaître aucune des personnes qui rendaient visite à (son) mari ». Le juge d’instruction de Briey rapporta qu’elle « fut arrêtée le 6 mai », date du mandat d’arrêt et le commissaire de police de Conflans, « le 3 mai 1942 pour le même motif (que son mari) par la gendarmerie de Jarny. » Il ne fait aucun doute que Suzanne fut arrêtée par la gendarmerie, le 3 mai fort probablement, puisqu’elle fut déférée, comme son mari et les époux Anciaux, devant le juge d’instruction de Briey.
Une information avait été en effet ouverte dès le 1er mai par ce juge à l’encontre d’Antoine Berthier et Raymond Anciaux pour « activité communiste commise dans l’arrondissement de Briey courant 1941 et 1942 ». Maria et Suzanne ayant été arrêtées, une confrontation générale eut lieu le 7 mai. Le 9 mai, le réquisitoire définitif étant établi, « le renvoi des quatre inculpés devant la section spéciale près la Cour d’Appel de Nancy » était ordonné. Le procureur de l’État français auprès du tribunal de Briey informa, le 9 mai, le procureur général près la Cour d’Appel de Nancy que « les autorités allemandes, qui ont de leur côté, procédé à une instruction séparée, ont fait extraire les inculpés de la maison d’arrêt de Briey, à la date du 7 mai, pour les transférer en un lieu qui n’a pu m’être donné. »
« Les époux Berthier furent emmenés à Nancy (au quartier allemand de la prison Charles III), où ils restèrent pendant un mois environ. Depuis cette date, aucune nouvelle n’est parvenue à leurs enfants. » Le 27 mai, les époux Berthier quittèrent la prison Charles III, Antoine pour la prison de Fresnes et Suzanne pour la prison de la Santé à Paris. Antoine et Raymond furent déportés Nuit et Brouillard (NN) le 12 juin 1942. Suzanne et Maria furent également déportées NN, à une date non connue. Les deux couples furent jugés par le Sondergericht (tribunal spécial) de Cologne le 4 juin 1943, qui les condamna à la peine de mort pour « avantages procurés à l’ennemi ». Suzanne Berthier et Maria Anciaux furent exécutées le 20 janvier 1944 à Dortmund.
Le commissaire aux R.G. de Briey demanda le 9 mai 1942 et obtint du préfet Jean Schmidt, le 29 mai 1942, le droit de se faire remettre la correspondance postale des époux Berthier, « de manière à pouvoir intercepter l’arrivée d’autres envois de tracts et éventuellement de découvrir l’expéditeur. » Camille Thouvenin indiqua après guerre que « notre camarade Berthier de Jarny, cheminot et photographe (fut aussi) responsable de notre travail de renseignement. » Antoine ne parla pas de ce travail de renseignement qui fut, en conséquence, ignoré des policiers et juges vichyssois et allemands.
Sources

SOURCES : Archives dép. de Meurthe-et-Moselle : 6 M 33-271 : Recensement de 1936, commune de Jarny ; 1447 W 1 : Dossiers pour la section spéciale près la Cour d’Appel de Nancy concernant les époux Berthier et Anciaux ; WM 329 : Rapports de gendarmerie concernant l’arrestation des époux Berthier et Anciaux ; 927 W 8 : Rapports d’audition par les policiers des Renseignements Généraux ; W 1556-4 : Registre des affaires du Parquet de Briey (14 juin 1940 au 15 juillet 1942). — AVCC Caen : Dossier AC 21 P 424 988. — Archives personnelles de Mme Jeanine Berthier.
Bibliographie : Onca Karol et Konieczny Alfred : Nuit et Brouillard. NN. L’opération terroriste nazie 1941-1944 La vérité , Imprimerie Le Dragon à Draguignan, 1981.
Magrinelli Jean-Claude :  L’affrontement , Éditions Kaïros, Nancy, 2019.
Thouvenin Camille :  La résistance en région Est , document dactylographié sans date. — FMD : Livre mémorial de la déportation.

Jean-Claude Magrinelli

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