Vitry-en-Artois (Pas-de-Calais) crypte des décapités de Munich le 28 novembre 1944, lieu de mémoire.
Les cendres de neuf résistants de Vitry-en-Artois et ses environs décapités et incinérés à Munich le 28 novembre 1944 reposent dans un monument crypte situé sur la route de Sailly-en-Ostrevent, lieu de parachutages.
De février à octobre 1943, il y eut, en tout, 33 arrestations sans compter celles d’Arras et Douai : 28 personnes furent déportées.
Pierre Lesage, garde-chasse, mourut sous la torture à la prison de Cuincy (Nord) le 10 septembre 1943.
Le Pas-de-Calais étant rattaché avec le département du Nord, au commandement militaire allemand de Belgique, les déportés sous statut Nacht und Nebel partis de Loos-lès-Lille (Nord) le 18 octobre 1943 furent emprisonnés à Bruxelles (Belgique) puis successivement dans différentes prisons et camps de concentration d’Allemagne.
Neuf furent condamnés à mort, après jugement du Tribunal du Peuple le 16 septembre 1944 à Munich, puis guillotinés à Munich le 28 novembre 1944. Les trois gendarmes de Vitry-en-Artois, Louis Défontaine, Émile Delefosse, Pierre Seneuze,ainsi que Eugène Dumont artisan- commerçant, René Grodecœur ouvrier d’usine, Jules Jambart instituteur-secrétaire de mairie, Léon Javelot chef de bureau, André Serrure receveur percepteur, René Vazé ouvrier métallurgiste.
La dernière recommandation orale des résistants à l’adresse de leur famille, par l’intermédiaire du prêtre qui les assistait était : « Nous mourrons en patriotes et en catholiques. Vive la France, Vive la liberté ».
Ils avaient écrit des lettres d’adieu, partiellement retrouvées en février 1946 lors de l’enquête du capitaine Willepois à Munich. Le 10 janvier 1956, un courrier du secrétariat général des prisonniers de guerre déportés et réfugiés à une veuve indiquait que les lettres écrites en français avaient été envoyées à Berlin, transcrites en sténo en allemand, puis à Paris où la sous-direction de la documentation et des recherches du Ministère de la population les avait fait traduire et ce ne sont que des copies qui ont été adressées aux familles.
Les neuf décapités furent incinérés au crématorium de Munich, dans des cercueils avec inscription « inconnu » et les urnes funéraires numérotées de 2554 à 2562 déposées collectivement au columbarium rendant impossibles toute identification personnelle.
Le 31 décembre 1945, le colonel FFI Girard-Moreau, responsable du réseau Centurie écrivit à une famille que le disparu était « présumé fusillé par les Allemands ».
Ramenées en France en mai 1947 par Georges Detrez et Ambroise Stienne (déporté), les neuf urnes furent, quelques temps, exposées dans le chœur de l’Église Saint-Martin de Vitry-en-Artois. Ne pouvant remettre les cendres aux familles, sous l’impulsion de Georges Détrez, les survivants du Groupement décidèrent la construction d’un monument commémoratif ayant la forme d’un tumulus et où les neuf urnes seraient réunies dans une chambre funéraire formant crypte.
Le 4 février 1950, le général De Gaulle vint en l’église de Vitry-en-Artois se recueillir devant les urnes et saluer les familles.
La construction du monument-crypte fut menée dans un climat de ferveur.
Le 8 octobre 1950, le général de Larminat président des Français libres et le préfet Georges Phalempin, présidèrent au transfert des cendres, assistés des responsables de la Résistance, Docteur Duflot de l’O.C.M., Obin de Voix du Nord, Colonel Gérard Moreau du réseau Centurie.
Le Comité d’érection voulut faire de ce monument-crypte, le symbole de la Résistance pour la Vallée de la Scarpe, et c’est ainsi que le fronton rappelle les noms des Déportés, camarades de combat des décapités de Munich, disparus dans les camps de concentration : François Delattre, Hubert Hermant, Arsène Mercier, Daniel Olivier à Gross-Rosen (Pologne), André Mercier à Bergen-Belsen et Jean Soille dans les marches de la mort en février 1945.
Les Compagnons de Georges Détrez associèrent dans leur hommage le souvenir d’un jeune pilote, Louis Lourdaux, de Vitry-en-Artois, abattu en combat aérien le 10 mars 1945 à Hasselt en Belgique.
« Passant, souviens-toi… cette Crypte où dorment neuf héros… ce fronton qui porte quelques noms de Combattants à l’ombre de la Croix de Lorraine…
Ils ont donné leur vie pour que vive la France.
Pour que vous viviez libres dans un Pays libre ».
Le 30 novembre 1980 à l’initiative de Georges Detrez fut créée une association Comité du monument-crypte des décapités de Munich groupant les anciens FFL, FFC, RIF et leurs familles, poursuivant les buts de maintien de l’esprit de résistance, l’aide aux familles de disparus, l’entretien et la conservation du monument-crypte ainsi que l’organisation des hommages chaque année. En 2021, son président Jacques Falcon a passé le relais à la municipalité.
Le 1er octobre 2017, ont été inaugurés les noms des rues du lotissement de la Plate Pierre à Vitry-sur-Artois qui portent les noms des neuf résistants décapités.
Louis Défontaine
Émile Delefosse
Eugène Dumont
René Grodecœur
Jules Jambart
Léon Javelot
Pierre Seneuze
André Serrure
René Vazé
SOURCES : SHD, Vincennes, GR 16P dossiers résistants. — Laurent Thiery La répression allemande dans le Nord de la France (1940-1944), Lille, Presses du Septentrion, 2013.— Extrait de la plaquette réalisée en 1982 par des élèves pour le concours de la résistance et de la déportation transmis par René Liétard à la demande de Christian Hermy.— Cahier d’hommage aux résistants et déportés, 1er octobre 2017.— Texte de la cérémonie du 75e anniversaire, novembre 2019. — FMD.— MémorialGenweb.— La Voix du Nord 28 novembre 2021.
Annie Pennetier