Né le 19 juillet 1921 à Crépy-en-Valois (Oise), fusillé le 10 mars 1944 au Mont-Valérien, commune de Suresnes (Seine, Hauts-de-Seine) ; chauffeur-livreur ; résistant au sein des FTPF du groupe Victor-Hugo.

Pierre Lorgnet (1921-1944)
Source : herosdegonesse.free.fr
Cimetière de Gonesse ; tombe de Pierre Lorgnet (1921-1944) ; plaque apposée par la famille.
Musée de la Résistance en ligne.
Fils de Fernand, employé au chemin de fer et d’Andrée, née Dhellier, couturière, Pierre Lorgnet, célibataire, demeurait 4 bis rue de Villepinte à Gonesse (Seine-et-Oise, Val-d’Oise). Avant-guerre, il n’était pas membre du Parti communiste. Il était en 1943 chauffeur-livreur pour la maison Gatujo au 54 avenue de la Motte-Picquet (XVe arr.). De la classe 1941, il craignait d’être contraint d’aller travailler en Allemagne au titre du Service du travail obligatoire (STO).
À la fin juin 1943, il contacta le lieutenant des sapeurs-pompiers de Gonesse Ketzinger qu’il connaissait. Rendez-vous fut pris dans le café La Ville de Dunkerque près de la gare du Nord. Pierre Lorgnet espérait ainsi pouvoir échapper au STO en se réfugiant à la campagne ou en montagne. Il eut un second contact avec un autre responsable, qui lui indiqua sans plus d’explications qu’il ferait partie du groupe Victor-Hugo. Il est probable qu’à ce moment-là, Lorgnet ignorait qu’il s’agissait des Francs-tireurs et partisans (FTP). Le troisième rendez-vous l’éclaira car il rencontra René (Émile Reaubourg) et Charles (André Joineau) chef de groupe et Jean (Jean Camus) chef d’équipe. Ce dernier lui indiqua que désormais, il se nommait Benoit, matricule 2122, qu’il serait rétribué mille cinq cents francs par mois plus des tickets d’alimentation, les missions du groupe étaient de saboter le matériel servant aux Allemands ou destiné à eux.
Permanent appointé des FTP, il participa à plusieurs actions contre les Allemands. À la mi-juillet, il se rendit en compagnie de Jean Camus à Gonesse où celui-ci avait repéré un hangar dans lequel était stocké du foin et de la paille. Camus lança un boudin incendiaire. Paille et foin prirent feu.
Le 20 juillet 1943 avec Charles Delagarde dit Bertin et Jean Camus, ils devaient incendier un camion allemand rue du Delta à Paris (IXe arr.), mais il y avait foule dans la rue. Ils se rendirent jusqu’au boulevard Voltaire (XIe arr.), où un camion stationnait devant un garage. Jean Camus déposa un boudin incendiaire sur la banquette du véhicule. Charles Delagarde revint un peu plus tard et constata que seuls les coussins de la cabine étaient légèrement endommagés.
Le lendemain, avec Jean Camus dit Jean, André Joineau dit Charles et Charles Delagarde dit Bertin, ils devaient abattre Sibra à son domicile de la rue Guénégaud (VIe arr.). Joineau et Delagarde étaient de protection tandis que Pierre Lorgnet gardaient les bicyclettes. Jean Camus devait procéder à l’exécution, qui échoua. Il participa le même mois à des incendies de camions allemands rue du Delta et sur le marché de Torcy (XVIIIe arr.). Ces actions ne provoquèrent que peu de dégâts.
En juillet, lors d’une conversation, Jean Camus demanda à Pierre Lorgnet s’il connaissait l’itinéraire qu’empruntait le commissaire de Gonesse, Franck Martineau, entre son domicile et le commissariat. Il lui indiqua ce qu’il connaissait de ses habitudes. Le 15 juillet il était dans l’équipe de FTP chargé de tuer le successeur ce commissiare. Y participaient Jean Camus, Charles Delagarde, André Joineau, Louis Rachinel. Pierre Lorgnet gardait les bicyclettes. L’opération fut un succès car le commissaire Franck Martineau, leur cible, fut abattu. Le 15 août vers 12 h 45, il pénétra dans le local des gardes-voies de Gonesse, avec notamment Jean Camus et Louis Furmanek. Ils chloroformèrent les deux gardiens. Onze revolvers furent récupérés.
Le 21 août quatre FTP se rendirent à bicyclettes jusqu’à la mairie de Fourqueux près de Saint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise, Yvelines). À la fermeture de la mairie, la secrétaire de la mairie devait sortir avec une sacoche contenant des tickets de rationnement. Elle sortit accompagnée d’un homme. Galo gardait les vélos. Par mesure de prudence les FTP décidèrent de la suivre jusqu’à son domicile. Émile Reaubourg, accompagné de Roland Vachette dit Francis, frappa à la porte du pavillon et entra. Une dispute éclata avec la secrétaire. Réaubourg sortit, indiqua aux autres FTP : « Il n’y a rien à faire. » À l’intérieur le ton monta entre la femme et Roland Vachette. Elle menaça d’appeler la gendarmerie.
Le 27 août, sur instruction de Béret (Louis Chapiro), ils attaquèrent avec Jean Camus et Émile Reaubourg un particulier qui était au volant de son véhicule quai de Tokyo (XVIe arr.). L’homme fut abandonné sur la route de Versailles. L’équipe alla à la mairie de Sèvres-les-Bruyères pour dérober des tickets d’alimentation. Devant la mairie, Pierre Lorgnet resta au volant. Les FTP entrèrent et ressortirent dix minutes plus tard. Échec... les tickets d’alimentation n’étaient pas livrés.
Le 31 août 1943 vers 7 heures, Jean Camus, sous la menace d’une arme, vola une automobile au Pont de Levallois-Perret (Seine, Hauts-de-Seine). Galo Bordèje et Roland Vachette s’engouffrèrent dans le véhicule. Aux environs de Gonesse, le chauffeur fut libéré, à Chantilly trois autres FTP (Émile Réaubourg, Pierre Lorgnet et Louis Chapiro) montèrent dans la voiture. À la mairie du lieu, l’attaque n’était pas réalisable, et ils revinrent vers Paris... panne d’essence à cent mètres d’un poste allemand. Direction Roissy-en-France à pied, le groupe fut repéré par des soldats allemands. Des coups de feu furent échangés. Galo Bordèje lança une grenade contre une automobile allemande qui s’enflamma... la diversion ne fut pas suffisante. Émile Reaubourg, Galo Bordèje et Pierre Lorgnet furent arrêtés. Ce dernier eut le temps de se tirer une balle dans la tempe droite avant son arrestation.
Hospitalisé à la Pïtié-Salpêtrière (XIIIe arr.), Pierre Lorgnet fut interrogé par le Sonderkommando IV de la police de sécurité et du renseignement de la SS (Sipo-SD) au 11 rue des Saussaies (VIIIe arr.), puis par un inspecteur de la Sûreté. Le commissaire René Hénoque de la BS2 poursuivit les interrogatoires. Les policiers voulaient connaître à tout prix le nom du FTP qui avait tué le commissaire Paul Tissot le 28 juin 1943 à Vincennes. Il révéla son surnom, « Blanche », et le nom de Jean Camus qui avait tué le 15 juillet 1943 le commissaire Franck Martineau. Les séances durent être interrompues à plusieurs reprises du fait de son état de faiblesse.
Incarcéré à la prison de Fresnes, il comparut le 29 février 1944 devant le tribunal du Gross Paris qui siégeait rue Boissy-d’Anglas (VIIIe arr.). Condamné à mort pour « actes de franc-tireur », Pierre Lorgnet fut passé par les armes le 10 mars au Mont-Valérien en même temps que Maurice Charpentier, Galo Bordèje, Charles Delagarde, Albert Drouhot et Louis Furmanek.
L’abbé Franz Stock qui assistait les condamnés écrivit le 10 mars :« Vendredi 10.3.44, 7 exécutions, Visites à Fresnes, 3e division. Puis 7 exécutions l’après-midi : Bordeje Galo 1919 ; Lorgnet Pierre 1921 ; Réaubourg Emile 1919 ; Charpentier Maurice 1919 ; Delagarde Charles 1913 ; Drouhot Albert 1911 ; Furmanek Louis 1926 ; se sont confessés et ont communié tous les 7, alors que, communistes, ils oeuvrent pour la cause. Enterrés à Ivry. »
_Réinhumé dans le cimetière communal de Gonesse, son portrait figure sur le monument aux morts. Sur une stèle commémorative portant les noms de Jean Camus, Louis Furmanek et Pierre Lorgnet est inscrit : « Aux enfants de Gonesse morts pour la libération de la France, fusillés par les Allemands aux Mont-Valérien. » Le conseil municipal donna son nom à une rue de la ville.
Sources

SOURCES : Arch. PPo., BA 1748, BA 1928, BS2 carton 36. — DAVCC, Caen, Boîte 5, Liste S 1744-140/44 (Notes Thomas Pouty). — Site Internet Mémoire des Hommes. – Mémorial GenWeb. – État civil, Crépy-en-Valois. — Note d’André Balent.

Daniel Grason, Gérard Larue

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