Né le 19 janvier 1924 à Saint-Roman-de-Codières (Gard), mort le 28 février 1944 à Colognac (Gard) ; exécuté par des SS de la 9e division blindée SS Hohenstaufen réfractaire du STO

Fernand Soulier faisait partie de l‘une des trois familles paysannes qui vivaient dans le hameau de Driolle rattaché à la commune cévenole de Saint-Roman-de Codières, proche de la limite avec l’Hérault. La famille Soulier était de religion protestante.
Les SS de la division Hohenstaufen arrivèrent à la bourgade cévenole de Saint-Hippolyte-du-Fort (Gard) vers 2 heures 30 du matin. Ils y établirent leur cantonnement et installèrent leur état-major au château de Planque. Peu de temps après, vers 5 heures 30, un groupe reçut l’ordre de faire mouvement vers Driolle susceptible d’abriter des maquisards, en particulier, le maquis (AS) dirigé par René Rascalon qui était repéré dans le secteur. D’autre part, des habitants du hameau avaient été signalés par des informateurs comme étant des résistants ou, à tout le moins, des sympathisants des maquisards qui aidaient les réfractaires du STO. Ils arrivèrent à Driolle, une heure après leur départ. Un des fils Ordines, Henri, eut le temps de s’enfuir et eut ainsi la vie sauve. Les autres habitants ou résidents temporaires de Driolle furent arrêtés. La maison des Ordines fut la première à être investie par les Allemands. Miguel Ordines et sa femme Isabelle furent arrêtés ainsi que leur fils cadet, Jean, et les deux réfractaires au STO qu’ils hébergeaient, Fernand Broussous et Jean-Louis Baudouin. Chez les Soulier, ils arrêtèrent la mère, le fils, Fernand, et un « visiteur » venu de Calvisson (Gard) pour se ravitailler, Roger Mathieu. Ce jeune homme ignorait qu’il avait été entre temps convoqué au STO et qu’il était considéré comme réfractaire. Par contre, ils laissèrent libres M. Perrier et sa fille. Les habitants de Driolle arrêtés furent conduits au château de Planque à Saint-Hippolyte-de-Fort. Ils les « interrogèrent » et décidèrent que Fernand Broussous serait pendu au pont de la voie ferrée qui traverse la route de Saint-Hippolyte-du-Fort à Lasalle, ce qui fut rapidement fait.
Ce ne fut pas le cas de Fernand Soulier. Conduit comme les autres à la gendarmerie de Lassalle. Des SS vinrent le chercher et l’embarquèrent sur une autochenille. Bien renseignés, les Allemands connaissaient les lieux de cantonnements de maquis. Ils lui demandèrent de les accompagner à celui, présumé, du maquis (AS) de René Rascalon. Ils se rendirent d’abord à Colognac (Gard)), village voisin de Saint-Roman-de-Codières, lui aussi à majorité protestante et favorable à la Résistance. Puis, ils empruntèrent une draille (chemin de transhumance ovine) quii conduidait au mas des Fosses. Y étant parvenus, ils fouillèrent la bâtisse et constatèrent qu’elle avait été récemment occupée. Ils l’incendièrent. De retour vers Colognac, dépités, ils abattirent Fernand Soulier vers 10 heures du matin sur la draille reliant ce village au mas des Fosses. Il fut tué par « une balle qui, entrée par la nuque, est ressortie au ras des narines ». Trois jours plus tard, son cadavre, méconnaissable fut retrouvé par un berger du mas Bouzanquet. À Colognac, personne ne le reconnut. Ce fut Félix Hébrard qui passait par hasard à Colognac qui reconnut son identité alors que le corps avait été déposé dans le temple réformé du village. Ses parents, alertés, le reconnurent à leur tour. Le maire de Colognac, Vialas, fit prévenir le pasteur afin d’organiser les funérailles religieuses. L’inhumation eut lieu le 3 mars à Driolle, hameau que les Allemands avaient incendié, en présence d’une importante assistance.
Les otages de Driolle et de Lassalle furent amenés à Nîmes. Les femmes furent incarcérées à la prison de la ville d’où elles furent extraites sans explications trois mois plus tard. Les hommes capturés à Driolle, sauf Broussous déjà pendu à Saint-Hippolyte-du-Fort furent regroupés avec les otages capturés à Ardaillers (commune de Valleraugue, Gard) (Voir par exemple Louis Carle) et à Lasalle. Plus tard, ils furent rejoints par les deux maquisards de Bir Hakeim blessés dans un affrontement avec les Allemands à Saint-Hippolyte-du-Fort et capturés à l’hôpital de Nîmes. Le 2 mars 1944, ils y furent pendus publiquement.
Le cas de Fernand Soulier, exécuté sommairement deux jours plus tôt ne peut être dissocié de celui des pendus de Nîmes. Tout comme eux et comme Fernand Broussous pendu à Saint-Hippolyte-du-Fort, il fut une des victimes civiles ou résistantes de l’expédition montée par la division SS Hohenstaufen afin d’éradiquer les maquis cévenols, qui, dans une large mesure, leur échappèrent à cette occasion. Le hameau de Driolle paya un lourd tribut pour avoir suscité des vocations résistantes et abrité des réfractaires au STO.
Le nom de Fernand Soulier figure sur la plaque commémorative des morts des guerres du XXe siècle apposée dans la mairie de Saint-Roman-de-Codières. Il fut homologué combattant des FFI. On ignore à quelle organisation il appartenant ; L’homologation en qualité de FFI est purement théorique car ils ne furent créés dans le Gard que peu de temps avant la Libération du département en août 1944. Il était, tout au moins, un sympathisant actif de la Résistance, prêt à rejoindre un maquis car réfractaire au STO. Il y a un dossier à son nom au Service historique de la Défense, Vincennes coté 16 P 554394 (résistant).
Sources

SOURCES : Gérard Bouladou, Les maquis du Massif Central méridional 1943-1944. Ardèche, Aude, Aveyron, Gard, Hérault, Lozère, Tarn, Nîmes, Lacour Rediviva, 2006, 617 p. [En particulier, pp. 149-150, p. 320]. — Claude Émerique, « Les pendus de Nîmes », in La Résistance dans le Gard, Paris, AERI, CDROM et livret d’accompagnement, 36 p. Paris, 2009. — Aimé Vielzeuf, Bloc-notes 44 (Dans le Gard, en attendant la liberté), Nîmes, Lacour, 1994, 150 + XXXII p. [voir plus particulièrement les pp. 27-29 et 31-33]. — Aimé Vielzeuf, En Cévennes et Languedoc. Au temps des longues nuits, Nîmes, Lacour, 2002, 276 p, le chapitre III, « de l’affaire de Saint-Hippolyte-du-Fort aux pendaisons de Nîmes (28 février-2 mars 1944) », pp. 104-195, plus particulièrement les pp. 112-127. — Site MemorialGenWeb consulté le 23 octobre 2019. — Site Mémoire des hommes, consulté le 23 octobre 2019, fiche « Soulier Fernand ».

André Balent

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